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La répartition de la richesse
Samedi 19 juin 2010 à 10h50 et à 11h15.
Devant l’Alcazar de Marseille
Théâtre : un hold-up géant
Deux costumes cravates, hauts de forme, à cigares, masqués, débarquent dans la foule – avec des pistolets, et des nez rouges :
Nous sommes les frères richards
Nés sous le signe des cadeaux
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Tous deux plein de milliards
Ayant eu des actions très tôt
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
N°1 : Haut les mains !
N°2 : Personne ne bouge !
N°1 : Pas de panique !
N°2 : Nous sommes le gang des richards…
N°1 : On veut juste cent milliards…
N°2 : Toi ! File-moi ton portif ! Bouge pas ! Bouge pas ch’t’ai dit ou je t’écrase la gueule. (Fouille.) Quoi ? Y a que ça ?
Metteur en scène, mécontent : Coupez ! (S’approche.) Mais non, ça va pas. Vous débloquez, les gars. (Leur enlève les cagoules.) Vous êtes des riches, n’oubliez pas. Vous imaginez, les riches, arriver comme ça : « Bouge pas ou je t’écrase la gueule ! » Non, les riches, même quand ils vous volent, ils restent polis. Aimables. Courtois. Raisonnables.
N°1 : Mais comment qu’on vole en restant polis ?
N°2 : Ouais, comment qu’on vole en restant polis ? Qu’est-ce j’y dis : « Excusez-moi, Monsieur, pourriez-vous avoir l’obligeance de me prêter votre portefeuille ? »
Metteur en scène, pique le cigare et le haut de forme à N°1 : Regarde, c’est moi le patron. Toi, t’es le travailleur. Qu’est-ce tu me racontes ?
N°1 : Ben, que j’aimerais bien une augmentation, parce qu’y a tout qui augmente, les loyers, les courses, le téléphone…
Metteur en scène : Vraiment, cher ami, je suis désolé, mais nous ne pouvons pas nous le permettre. Des années de modération salariale seront nécessaires pour rétablir la compétitivité de notre entreprise…
N°1 : Même une petite augmentation ? Une comme ça ? Une comme l’inflation ?
Metteur en scène : N’insistez pas, cher ami. Vous connaissez la concurrence comme moi, et vous savez bien que nous n’avons pas le choix : un Polonais coûte quatre fois moins cher que vous, un Chinois vingt fois moins… D’ailleurs, c’est franchement regrettable, mais une restructuration de votre secteur est nécessaire…
N°1 : Pardon ? Qu’est-ce qu’il me cause ?
Metteur en scène : On va devoir se passer de vos services.
N°1 : Mais c’est pas juste ! Vous embauchez des intérimaires…
Metteur en scène : C’est comme ça, et croyez bien que j’en suis désolé, mais nous sommes contraints de nous adapter à la demande sur un marché de plus en plus flexible. (Ôte son chapeau.) Pigé ? Maintenant, toi, vas-y toi, file-moi ta Rolex. (La montre de N°2 change de poignet.) Je fais le Président, tu fais le syndicaliste, d’accord ? Qu’est-ce que tu me réclames ?
N°2 : Je réclame une hausse du SMIC ! Un coup de pouce pour le pouvoir d’achat !
Metteur en scène : Vous le savez bien : j’aime le travail. J’aime les travailleurs. Mais je ne peux pas distribuer les cadeaux de Père Noël car les Français savent bien qu’il n’y a pas d’argent dans les caisses. Pour donner du pouvoir d’achat, il faut réhabiliter le travail. Et pour ça, j’ai des idées.
N°2 : Comme quoi ?
Metteur en scène : Il faut ré-for-mer. Permettre aux gens qui le souhaitent, par exemple, de faire des heures supplémentaires, de travailler le dimanche, de prolonger jusqu’à 70 ans…
N°2 : Ah mais non…
Metteur en scène : Quoi, « Ah mais non » ? Quoi « Ah mais non » ? De toute façon, on n’a pas le choix. Prenez le trou de la Sécu : 11 milliards d’Euros. Ca vous paraît normal, 11 milliards d’Euros ? C’est une dette que vous allez léguer à vos enfants. Eh bien, il va falloir contrôler tout ça. Procéder à des déremboursements. Elever le forfait hospitalier.
N°2 : Ah mais non…
Metteur en scène : Y a pas de « Ah mais non » ! Ces réformes sont inéluctables.
Et les retraites, pareilles. Un trou de 5 milliards d’E ! Eh bien, moi, je vous le dis franchement : c’est fini. Il va falloir cotiser plus et plus longtemps, pour toucher moins… (Enlève sa Rolex.) T’as compris ? Voilà comment ils volent, les ministres, les PDG.
N°1, vérifiant son portefeuille : Mais là, tu ne nous as rien volés !
Metteur en scène : Que tu crois ! Et c’est là toute l’astuce : depuis vingt ans qu’on vous répète « SMIC trop élevé », « manque de flexibilité », « réformes inéluctables », « modération salariale », depuis vingt ans – et malgré la crise – le cours des actions a été multiplié par trois ! Et les dividendes, et les stock-options, et les revenus des PDG ! D’ailleurs, c’est simple, c’est marqué dans Fakir alors c’est pas des conneries : « depuis 1983, la part du travail dans la valeur ajoutée a baissé de 9,3 % en France. »
N°1 : Oula oula oula oula ! Je suis pas polytechnicien, moi, juste acteur. On me demande de faire le chien, je me mets à quatre pattes et j’aboie…
N°2, à quatre pattes : Ouah ouah !
N°1 : On me demande de faire le patron-voleur, je mets un haut de forme et je crie…
N°2 : Haut les mains !
N°1 : Mais tes histoires de valeur ajoutée, là, de 9,3 % (souffle)...
N°2 : Moi je fais carrément le chien de patron voleur : Ouah ouah ! Haut les mains ! Ouah ouah !
Metteur en scène : C’est simple. Monsieur le professeur d’Université va vous expliquer.
Prof : La valeur ajoutée, c’est la somme de tout ce qui est produit dans le pays. En France, c’est environ 2 000 milliards d’Euros. (Inscrit 2000 milliards.) En 1983, environ 75 % (Inscrit 75 %.) partait aux travailleurs – en salaires, mais aussi en retraite, en sécurité sociale, en ASSEDIC. Aujourd’hui, c’est à peu près 65 % (Inscrit 65 %). 75 % - 65 %, égal ? 10 %. 10 % de 2 000 millards, ça fait combien ? 200 milliards.
Ca signifie que, si on avait conservé la répartition Capital / Travail de 1983, les travailleurs toucheraient – chaque année – 200 milliards de plus. Soit 5 000 euros de plus par tête ! C’est ça que nos camarades guadeloupéens appellent la profitation.
Metteur en scène : Et ils sont passés où, ces 200 milliards ? Dans la poche des actionnaires !
Donc, vous n’avez rien senti, ils sont restés très gentils, mais ils ont fait un sacré trou dans votre budget… Dix fois plus grand, au moins, que le trou de la Sécu. Trente fois plus grand que le déficit des retraites.
N°1 : Et comment qu’on fait, maintenant, pour les récupérer ces sous ?
N°2 : Ben oui, comment qu’on fait ?
Metteur en scène : Alors là, justement, c’est à vous de jouer…
N°1, en bleu de chauffe : Haut les mains !
N°2 : Personne ne bouge !
N°1 : Où qu’il est le richard là-dedans ?
N°2 : Sortez voir un peu vos Rolex…
N°1 : Nan mais quand ils viennent chez Babeuf, ils les planquent avant…
N°2 : Pis ils garent leur Rolls loin de la salle…
N°1 : Pareil, leur yacht, pour pas qu’on le voit, ils le laissent au pont de Camon…
N°2 : C’est qu’on va leur ratiboiser tout ça…
Nous sommes les frères richards
Nés sous le signe des cadeaux
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Tous deux plein de milliards
Ayant eu des actions très tôt
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Nous sommes les frères richards
Nés sous le signe des cadeaux
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Tous deux plein de milliards
Ayant eu des actions très tôt
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Théâtre : un hold-up géant
Deux costumes cravates, hauts de forme, à cigares, masqués, débarquent dans la foule – avec des pistolets, et des nez rouges :
Nous sommes les frères richards
Nés sous le signe des cadeaux
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Tous deux plein de milliards
Ayant eu des actions très tôt
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
N°1 : Haut les mains !
N°2 : Personne ne bouge !
N°1 : Pas de panique !
N°2 : Nous sommes le gang des richards…
N°1 : On veut juste cent milliards…
N°2 : Toi ! File-moi ton portif ! Bouge pas ! Bouge pas ch’t’ai dit ou je t’écrase la gueule. (Fouille.) Quoi ? Y a que ça ?
Metteur en scène, mécontent : Coupez ! (S’approche.) Mais non, ça va pas. Vous débloquez, les gars. (Leur enlève les cagoules.) Vous êtes des riches, n’oubliez pas. Vous imaginez, les riches, arriver comme ça : « Bouge pas ou je t’écrase la gueule ! » Non, les riches, même quand ils vous volent, ils restent polis. Aimables. Courtois. Raisonnables.
N°1 : Mais comment qu’on vole en restant polis ?
N°2 : Ouais, comment qu’on vole en restant polis ? Qu’est-ce j’y dis : « Excusez-moi, Monsieur, pourriez-vous avoir l’obligeance de me prêter votre portefeuille ? »
Metteur en scène, pique le cigare et le haut de forme à N°1 : Regarde, c’est moi le patron. Toi, t’es le travailleur. Qu’est-ce tu me racontes ?
N°1 : Ben, que j’aimerais bien une augmentation, parce qu’y a tout qui augmente, les loyers, les courses, le téléphone…
Metteur en scène : Vraiment, cher ami, je suis désolé, mais nous ne pouvons pas nous le permettre. Des années de modération salariale seront nécessaires pour rétablir la compétitivité de notre entreprise…
N°1 : Même une petite augmentation ? Une comme ça ? Une comme l’inflation ?
Metteur en scène : N’insistez pas, cher ami. Vous connaissez la concurrence comme moi, et vous savez bien que nous n’avons pas le choix : un Polonais coûte quatre fois moins cher que vous, un Chinois vingt fois moins… D’ailleurs, c’est franchement regrettable, mais une restructuration de votre secteur est nécessaire…
N°1 : Pardon ? Qu’est-ce qu’il me cause ?
Metteur en scène : On va devoir se passer de vos services.
N°1 : Mais c’est pas juste ! Vous embauchez des intérimaires…
Metteur en scène : C’est comme ça, et croyez bien que j’en suis désolé, mais nous sommes contraints de nous adapter à la demande sur un marché de plus en plus flexible. (Ôte son chapeau.) Pigé ? Maintenant, toi, vas-y toi, file-moi ta Rolex. (La montre de N°2 change de poignet.) Je fais le Président, tu fais le syndicaliste, d’accord ? Qu’est-ce que tu me réclames ?
N°2 : Je réclame une hausse du SMIC ! Un coup de pouce pour le pouvoir d’achat !
Metteur en scène : Vous le savez bien : j’aime le travail. J’aime les travailleurs. Mais je ne peux pas distribuer les cadeaux de Père Noël car les Français savent bien qu’il n’y a pas d’argent dans les caisses. Pour donner du pouvoir d’achat, il faut réhabiliter le travail. Et pour ça, j’ai des idées.
N°2 : Comme quoi ?
Metteur en scène : Il faut ré-for-mer. Permettre aux gens qui le souhaitent, par exemple, de faire des heures supplémentaires, de travailler le dimanche, de prolonger jusqu’à 70 ans…
N°2 : Ah mais non…
Metteur en scène : Quoi, « Ah mais non » ? Quoi « Ah mais non » ? De toute façon, on n’a pas le choix. Prenez le trou de la Sécu : 11 milliards d’Euros. Ca vous paraît normal, 11 milliards d’Euros ? C’est une dette que vous allez léguer à vos enfants. Eh bien, il va falloir contrôler tout ça. Procéder à des déremboursements. Elever le forfait hospitalier.
N°2 : Ah mais non…
Metteur en scène : Y a pas de « Ah mais non » ! Ces réformes sont inéluctables.
Et les retraites, pareilles. Un trou de 5 milliards d’E ! Eh bien, moi, je vous le dis franchement : c’est fini. Il va falloir cotiser plus et plus longtemps, pour toucher moins… (Enlève sa Rolex.) T’as compris ? Voilà comment ils volent, les ministres, les PDG.
N°1, vérifiant son portefeuille : Mais là, tu ne nous as rien volés !
Metteur en scène : Que tu crois ! Et c’est là toute l’astuce : depuis vingt ans qu’on vous répète « SMIC trop élevé », « manque de flexibilité », « réformes inéluctables », « modération salariale », depuis vingt ans – et malgré la crise – le cours des actions a été multiplié par trois ! Et les dividendes, et les stock-options, et les revenus des PDG ! D’ailleurs, c’est simple, c’est marqué dans Fakir alors c’est pas des conneries : « depuis 1983, la part du travail dans la valeur ajoutée a baissé de 9,3 % en France. »
N°1 : Oula oula oula oula ! Je suis pas polytechnicien, moi, juste acteur. On me demande de faire le chien, je me mets à quatre pattes et j’aboie…
N°2, à quatre pattes : Ouah ouah !
N°1 : On me demande de faire le patron-voleur, je mets un haut de forme et je crie…
N°2 : Haut les mains !
N°1 : Mais tes histoires de valeur ajoutée, là, de 9,3 % (souffle)...
N°2 : Moi je fais carrément le chien de patron voleur : Ouah ouah ! Haut les mains ! Ouah ouah !
Metteur en scène : C’est simple. Monsieur le professeur d’Université va vous expliquer.
Prof : La valeur ajoutée, c’est la somme de tout ce qui est produit dans le pays. En France, c’est environ 2 000 milliards d’Euros. (Inscrit 2000 milliards.) En 1983, environ 75 % (Inscrit 75 %.) partait aux travailleurs – en salaires, mais aussi en retraite, en sécurité sociale, en ASSEDIC. Aujourd’hui, c’est à peu près 65 % (Inscrit 65 %). 75 % - 65 %, égal ? 10 %. 10 % de 2 000 millards, ça fait combien ? 200 milliards.
Ca signifie que, si on avait conservé la répartition Capital / Travail de 1983, les travailleurs toucheraient – chaque année – 200 milliards de plus. Soit 5 000 euros de plus par tête ! C’est ça que nos camarades guadeloupéens appellent la profitation.
Metteur en scène : Et ils sont passés où, ces 200 milliards ? Dans la poche des actionnaires !
Donc, vous n’avez rien senti, ils sont restés très gentils, mais ils ont fait un sacré trou dans votre budget… Dix fois plus grand, au moins, que le trou de la Sécu. Trente fois plus grand que le déficit des retraites.
N°1 : Et comment qu’on fait, maintenant, pour les récupérer ces sous ?
N°2 : Ben oui, comment qu’on fait ?
Metteur en scène : Alors là, justement, c’est à vous de jouer…
N°1, en bleu de chauffe : Haut les mains !
N°2 : Personne ne bouge !
N°1 : Où qu’il est le richard là-dedans ?
N°2 : Sortez voir un peu vos Rolex…
N°1 : Nan mais quand ils viennent chez Babeuf, ils les planquent avant…
N°2 : Pis ils garent leur Rolls loin de la salle…
N°1 : Pareil, leur yacht, pour pas qu’on le voit, ils le laissent au pont de Camon…
N°2 : C’est qu’on va leur ratiboiser tout ça…
Nous sommes les frères richards
Nés sous le signe des cadeaux
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Tous deux plein de milliards
Ayant eu des actions très tôt
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Nous sommes les frères richards
Nés sous le signe des cadeaux
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do
Tous deux plein de milliards
Ayant eu des actions très tôt
Mi fa sol la mi ré
Ré mi fa sol sol sol ré do