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* René Teboul est maitre de conférences en Economie politique à l’Université Aix - MarseilleL’avenir de l’euro
René Teboul

L’avenir de l’Union européenne passe forcément par l’euro. C’est qu’en effet la monnaie européenne, partagée par près de la moitié des pays de l’Union, est le seul succès politique et économique de l’Union européenne.

Lors de sa mise en oeuvre, l’euro devait représenter le couronnement de la politique économique européenne de convergence. Cela sous-entendait que l’application des critères définis par les accords de Maastricht allait amener les différents pays membres à converger à la fois vers la même politique économique, et vers la même forme de modèle économique et social, sans que pour cela il soit besoin de mettre en place un gouvernement économique européen unifié. Autrement dit, le but de la réforme monétaire et de l’adoption de l’euro était de confier aux seuls marchés financiers la gestion de la politique économique de l’Europe. L’objectif était de construire une entité économique autour d’un euro fort, entité qui permettrait de gérer l’excédent commercial de la zone euro.

Pour faire converger les économies de la zone euro vers le même type de croissance et de modèle de développement, il faut que celles-ci ne soient accessibles qu’aux pays qui suivent des règles budgétaires et monétaires semblables. Ce sont ces règles qui sont contenues dans les accords de Maastricht. Les gouvernements qui veulent participer à la gestion de la monnaie unique, qui veulent l’utiliser, doivent satisfaire à trois principes généraux :
. maintenir une inflation en dessous de 2% par an.
. maintenir le déficit budgétaire inférieur à 3% du PIB.
. contenir la dette publique en dessous de 60% du PIB.
Avant d’aller plus loin, nous devons présenter les avantages et les inconvénients de la monnaie unique.
Les avantages sont liés à ceux d’une monnaie forte : dans ce cas là les exportations sont surévaluées, et les importations sont sous-évaluées, notamment lorsque celles-ci sont libellées en dollars. La monnaie unique forte est sensée orienter les échanges de la zone euro vers des exportations à forte valeur ajoutée.

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Les inconvénients de la monnaie unique telle qu’elle a été conçue à Maastricht apparaissent aujourd’hui dans toute leur force :
• Une totale indépendance politique de la Banque Centrale, conçue par des Banquiers Centraux qui composaient le groupe Delors (1987-1989) avec un seul objectif : combattre l’inflation (en dessous de 2 % selon la décision du Comité des Gouverneurs, chiffre qui n’a été fixé par aucune autorité politique) n’a pas d’équivalent dans le reste du monde.

• Pas de politique monétaire. La Banque centrale ne tient compte ni de la croissance ni de l’emploi. Elle n’a pas les moyens de corriger les différences des taux d’intérêt réels entre les pays selon le niveau de leur inflation. Celle-ci varie de 1,5 % en Allemagne, à plus de 5 % au Portugal et en Irlande et est à peine inférieure à 5 % en Espagne. Plus l’inflation est forte, et plus les taux d’intérêt sont bas ! C’est le monde à l’envers !

• Pas de politique de change. La Banque centrale n’est pas autorisée à émettre des euros pour acheter des dollars. Elle ne peut enrayer l’appréciation de l’euro, contrepartie de l’affaiblissement du dollar et qui deviendrait synonyme d’étouffement à partir d’un euro égal ou supérieur à 1,5 dollar. Dans cette hypothèse, les risques d’éclatement de la zone euro seraient très grands. Or, les déficits abyssaux de la balance commerciale US (300 Milliards en 2001, plus de 700 Milliards en 2005) rendent la reprise de la dépréciation du dollar inévitable. La crise est donc devant nous. Personne ne semble s’y être préparé. En tout cas pas les autorités monétaires européennes qui déclarent hautement ne pas avoir de politique en matière de change et s’en remettre entièrement aux marchés.

• Pas de politique budgétaire : le pacte de stabilité budgétaire exerce une influence qui accentue le cycle économique. Il joue un rôle non pas contracyclique mais procyclique. Quand la déflation menace, il en accroît le risque. La zone euro n’a ni politique monétaire, ni politique budgétaire, ni politique de change. Le contrôle politique sur la BCE est inexistant. Gouvernements et Parlements naviguent à l’aveugle. Notons cependant que le Parlement européen en juillet 2005 a refusé de donner quitus de son rapport à la BCE.

* René Teboul est maitre de conférences en Economie politique à l’Université Aix - MarseilleL’avenir de l’euro
René Teboul

L’avenir de l’Union européenne passe forcément par l’euro. C’est qu’en effet la monnaie européenne, partagée par près de la moitié des pays de l’Union, est le seul succès politique et économique de l’Union européenne.

Lors de sa mise en oeuvre, l’euro devait représenter le couronnement de la politique économique européenne de convergence. Cela sous-entendait que l’application des critères définis par les accords de Maastricht allait amener les différents pays membres à converger à la fois vers la même politique économique, et vers la même forme de modèle économique et social, sans que pour cela il soit besoin de mettre en place un gouvernement économique européen unifié. Autrement dit, le but de la réforme monétaire et de l’adoption de l’euro était de confier aux seuls marchés financiers la gestion de la politique économique de l’Europe. L’objectif était de construire une entité économique autour d’un euro fort, entité qui permettrait de gérer l’excédent commercial de la zone euro.

Pour faire converger les économies de la zone euro vers le même type de croissance et de modèle de développement, il faut que celles-ci ne soient accessibles qu’aux pays qui suivent des règles budgétaires et monétaires semblables. Ce sont ces règles qui sont contenues dans les accords de Maastricht. Les gouvernements qui veulent participer à la gestion de la monnaie unique, qui veulent l’utiliser, doivent satisfaire à trois principes généraux :
. maintenir une inflation en dessous de 2% par an.
. maintenir le déficit budgétaire inférieur à 3% du PIB.
. contenir la dette publique en dessous de 60% du PIB.
Avant d’aller plus loin, nous devons présenter les avantages et les inconvénients de la monnaie unique.
Les avantages sont liés à ceux d’une monnaie forte : dans ce cas là les exportations sont surévaluées, et les importations sont sous-évaluées, notamment lorsque celles-ci sont libellées en dollars. La monnaie unique forte est sensée orienter les échanges de la zone euro vers des exportations à forte valeur ajoutée.

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Les inconvénients de la monnaie unique telle qu’elle a été conçue à Maastricht apparaissent aujourd’hui dans toute leur force :
• Une totale indépendance politique de la Banque Centrale, conçue par des Banquiers Centraux qui composaient le groupe Delors (1987-1989) avec un seul objectif : combattre l’inflation (en dessous de 2 % selon la décision du Comité des Gouverneurs, chiffre qui n’a été fixé par aucune autorité politique) n’a pas d’équivalent dans le reste du monde.

• Pas de politique monétaire. La Banque centrale ne tient compte ni de la croissance ni de l’emploi. Elle n’a pas les moyens de corriger les différences des taux d’intérêt réels entre les pays selon le niveau de leur inflation. Celle-ci varie de 1,5 % en Allemagne, à plus de 5 % au Portugal et en Irlande et est à peine inférieure à 5 % en Espagne. Plus l’inflation est forte, et plus les taux d’intérêt sont bas ! C’est le monde à l’envers !

• Pas de politique de change. La Banque centrale n’est pas autorisée à émettre des euros pour acheter des dollars. Elle ne peut enrayer l’appréciation de l’euro, contrepartie de l’affaiblissement du dollar et qui deviendrait synonyme d’étouffement à partir d’un euro égal ou supérieur à 1,5 dollar. Dans cette hypothèse, les risques d’éclatement de la zone euro seraient très grands. Or, les déficits abyssaux de la balance commerciale US (300 Milliards en 2001, plus de 700 Milliards en 2005) rendent la reprise de la dépréciation du dollar inévitable. La crise est donc devant nous. Personne ne semble s’y être préparé. En tout cas pas les autorités monétaires européennes qui déclarent hautement ne pas avoir de politique en matière de change et s’en remettre entièrement aux marchés.

• Pas de politique budgétaire : le pacte de stabilité budgétaire exerce une influence qui accentue le cycle économique. Il joue un rôle non pas contracyclique mais procyclique. Quand la déflation menace, il en accroît le risque. La zone euro n’a ni politique monétaire, ni politique budgétaire, ni politique de change. Le contrôle politique sur la BCE est inexistant. Gouvernements et Parlements naviguent à l’aveugle. Notons cependant que le Parlement européen en juillet 2005 a refusé de donner quitus de son rapport à la BCE.